
La maison que nous avons bâtie
Réalisée en 2007 dans le cadre du concours d’intégration d’une œuvre d’art public au Centre Père-Marquette, dans l’arrondissement Rosemont—La Petite-Patrie, la murale représente une multitude de personnages sur des plans distincts. Cette fresque se penche sur l’aspect historique de la famille, son histoire, en évoquant les différents âges de la vie. Sans se présenter dans un ordre distinct, les personnages de la fresque déambulent tous de gauche à droite, inscrivant de cette façon un lien avec ce lieu de circulation, carrefour de tous les déplacements du Centre Père-Marquette. De cette façon l’espace est «habité» par ces personnages. Ce décor est ponctué de trouées qui laissent apparaître des détails architecturaux. On peut y voir l’ancienne usine Angus, qui fut successivement une usine de locomotives, d’armement, et d’entretien pour le CN, une verrière du Jardin Botanique et des structures d’acier, squelettes d’édifices en construction.
Cette œuvre reprend plusieurs thèmes de ma pratique, notamment le rapport entre l’espace et le sujet qui l’habite, puis la représentation à partir de différentes techniques de peinture. Construite à partir de modèles photographiques, la murale affiche un vaste éventail de techniques : du réalisme photographique à la peinture abstraite. Ensuite, cette murale est ponctuée de fenêtres ou trouées. Dans l’image représentée, les trouées, telles des fenêtres ou des murs absents, laissent apparaître un aplat bleu pâle, omniprésent dans mes tableaux, couleur de la trouée vers un espace indéfini. Sur le plan-surface de la peinture, un deuxième niveau de trouées laisse intouchée la texture du bois, trahissant l’aspect physique de l’objet peint. La «contamination» de la représentation classique par des surfaces de peinture abstraite ou par la surface du bois me permet d’élaborer des jeux de sens où, par analogie, j’explore le concept philosophique de «présence-au-monde».
Cette œuvre a été pensée en vue d’offrir un grand contraste avec le lieu. Ce lieu, dépourvu de décorations, espace neutre où s’affiche le dénuement des matériaux industriels, m’a inspiré une œuvre où abondent les contraires. À l’éclairage du néon, j’oppose des couleurs vives. Aux stricts angles de la salle, j’oppose des panneaux aux angles «arbitraires», qui viennent casser la monotonie des murs droits ; les panneaux semblent décollés du mur, en mouvement. Aux matériaux industriels (acier, ciment et recouvrements plastiques), j’oppose le bois, omniprésent dans les trouées de la murale. Enfin, dans cet espace sans fenêtre, l’œuvre, avec ses fenêtres et ses trouées, offrira au regard un ouverture.