
Sylvain Bouthillette
L’écrire en peinture
Commissaire : Rafael Sottolichio
Les peintres rassemblés dans l’exposition L’écrire en peinture proposent tous des recherches personnelles sur la nature même de la production de sens. Chacun des tableaux choisis explore une façon déterminée de lire le tableau : lire ce qui est écrit sur le tableau. Les peintres manient un vaste éventail de signes que leur public peut interpréter librement. Le sujet représenté, la matière, la couleur, la composition, le support du tableau, voire son format, sont les paramètres principaux qui servent à le « lire ». Les lettres et l’écriture font ici partie de ces signes.
Le médium de la peinture, avec son histoire et les conventions de son langage, offre ici un complément intéressant au jeu sémantique accompli par ces artistes. Que le sens soit énoncé sous la forme d’une phrase comme chez Sylvain Bouthillette et Martin Bureau, ou qu’il soit convoqué dans un mot unique, tels les mots de Monique Régimbald-Zeiber, ou encore qu’il s’inscrive dans un processus intellectuel comme chez Marie-Claude Bouthillier ou Mario Côté, le langage et l’écriture ne pourront jamais totalement ignorer les règles linguistiques. En dépit des attentes et des principes comme quoi la peinture est généralement associée à un travail d’intuition et d’expression, et malgré l’irritation que peut provoquer l’apparition de l’écriture, un fait demeure : son utilisation convoque une forme d’arbitraire qui détache sa lecture de la facilité. De cette façon, les signes dans l’œuvre de Francine Simonin semblent tout aussi porteurs d’un sens caché que les images et les mots dans celle de Thierry Arcand-Bossé. Les signes graphiques qui composent la peinture comme l’écriture sont les éléments d’un jeu élaboré par les artistes. Il s’agit là d’un jeu mystérieux qui se vit dans la contradictoire intimité du tableau, un jeu qui se sert d’un langage pour créer un sens équivoque. C’est dans ce mystère puis par cette ouverture que peut entrer le spectateur-lecteur, car c’est lui qui tranche en dernier lieu sur le sens des mots. Mais le sens, lui, demeure toujours en périphérie de l’expérience.